L'indemnisation des frais d'obsèques pour les victimes par ricochet en cas de décès

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« A titre liminaire, il n’est pas inutile de préciser que le juge de l’indemnisation refuse classiquement la prise en compte de l’incidence successorale du décès, que celle-ci soit favorable ou défavorable à ses proches.

Ainsi, les droits de mutation supportés par les héritiers n’ouvrent pas droit à indemnisation à leur profit.

De même, ni le passif successoral ni l’actif successoral ne sont pris en compte par le juge, en vertu du principe selon lequel l’incidence fiscale ne doit pas être prise en compte par le juge de l’indemnisation.

La Cour de cassation a cependant fait exception à cette règle dans le cas particulier d’un père ayant prévu, avant son décès, de s’associer avec son fils dans le but de bénéficier d’une exonération des droits de mutation.

Cet avantage fiscal ayant précisément été envisagé par le défunt et la victime par ricochet avant l’accident, il est logique que sa disparition soit dans ce cas considérée comme un préjudice économique indemnisable.

Ce poste a été distingué par la nomenclature des autres frais divers des proches, y compris ceux qui entourent les obsèques.

Une question de frontière assez artificielle se posera donc sur la prise en charge, par exemple, des frais de restauration imposés les obsèques.

Le tout est d’être cohérent dans la présentation de la demande, de l’offre ou du jugement et d’assurer l’indemnisation intégrale sans doublon.

On peut considérer que ces frais sont constitués principalement par les frais  funéraires proprement dits, mais également par les frais de transport du défunt ainsi que les frais de réception engagés lors des funérailles. Ces frais varieront évidemment selon les rites propres à chaque culture. Seule importe selon la nomenclature la justification concrète des frais engagés.

La jurisprudence a eu à se pencher sur la délicate question de l’éventuel caractère somptuaire des frais funéraires.

Une jurisprudence ancienne n’accordait l’indemnisation intégrale des frais d’obsèques que s’ils étaient considérés comme normaux et non excessifs.

Cette jurisprudence est de moins en moins vivace même si la Cour de cassation a eu l’occasion au regard des « frais habituellement exposés lors des funérailles ».

Un arrêt intéressant de la cour d’appel d’Aix-en-Provence en date du 1er avril 1988 admet au contraire le remboursement de frais dont le caractère excessif était invoqué par le défendeur.

La motivation ne manque pas d’intérêt : « Si des dépenses funéraires somptuaires allant au-delà de ce qui peut être considéré comme un hommage normal à la personne du défunt, ne sauraient en principe, être mises à la charge du tiers responsable, l’appréciation du caractère somptuaire ou non de ces dépenses doit se faire in concreto. En l’espèce, le décès brutal de la victime est la conséquence de la ruine de sa carrière de danseuse classique professionnelle qui était, depuis son plus jeune âge, sa réelle raison de vivre, l’ensemble des pièces produites démontre qu’elle avait devant elle une longue et brillante carrière de danseuse, il apparaît donc tout à fait préhensible et normal que sa mère ait voulu perpétuer le souvenir de cette passion pour la danse en faisant ériger, sur la tombe de sa fille, une stèle en forme de danseuse, dont le coût, eu égard au caractère particulier de cette demande, n’apparaît pas démesuré ».

Dans le même ordre d’idées, les juges s’accordent ou non le droit de n’indemniser qu’une partie des frais de caveau lorsque plusieurs places sont créées à la suite du décès.

Dans le cas précis du caveau multiple, la réduction de l’indemnisation paraît contestable.

Il ne peut en effet être reproché au conjoint de vouloir ériger un caveau susceptible d’accueillir le cercueil d’autres défunts, et notamment le sien.

Or, la construction d’un caveau unique entraînerait inévitablement des frais et des sons supplémentaires (avec notamment construction de caveau provisoire) lors des obsèques du conjoint survivant. La construction d’un caveau multiple semble donc constituer une dépense en lien avec le décès accidentel de la victime directe.
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En toute hypothèse, en votre qualité de victime, vous devez envisager l’ensemble de votre dossier pour la reconnaissance de la totalité de vos préjudices avec un avocat habitué à ce type de saisine, de négociations et de combat.




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* Max LE ROY, Jacques-Denis LE ROY, Frédéric BIBAL, L’évaluation du préjudice corporel, 21e édition LexisNexis