L'indemnisation des frais divers avant la consolidation en droit corporel

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« Il est important de prendre en compte la totalité des frais divers dépensés avant la consolidation dans le cadre de l’indemnisation intégrale du préjudice corporel.

Selon la nomenclature Dinthilhac, ce poste vise à indemniser la victime de tous les frais et de toutes les dépenses exposés à titre temporaire.

La nomenclature indique une liste de frais susceptibles d’être indemnisés au titre de ce poste, tout en précisant expressément qu’elle n’est pas exhaustive et doit être complété par tous les frais temporaires dont il sera rapporté la preuve.

Les coûts de tierce personne temporaire ont été inclus par la nomenclature Dintilhac dans ce poste.

Compte tenu de leur spécificité, ils doivent toutefois être indemnisés distinctement.

Les dépenses de santé constituent un poste de préjudice distinct et ne sont donc pas incluses dans ce poste.

Au titre des frais divers, peuvent également figurer les frais professionnels ponctuels et/ ou exceptionnels engagés, à titre temporaire, par la victime exerçant une profession indépendante ou libérale pour recourir à du personnel de remplacement.

Dans ce cas, ces frais ne sont donc ni inclus dans les frais de tierce personne avant consolidation, ni dans les pertes de gains professionnels avant consolidation.

Toutefois, une évolution souhaitable consisterait à indemniser ce type de frais au titre du préjudice professionnel temporaire/

Le remboursement du forfait hospitalier correspondant à des dépenses de bouche et d’hébergement n’est pas sollicité parmi les dépenses de santé, mais bien au titre des frais divers.

Le poste des frais divers n’existe, en tant que tel, qu’à titre temporaire et aucun poste aussi vaste n’existe à titre permanent.

Certaines dépenses incluses à titre temporaire au sein des frais divers constitueront cependant un poste autonome à titre permanent, tels les frais de transport ou les frais de logement.

Sont réparés au titre des frais divers, les frais temporaires :

  • De conseiller technique (médecin-conseil, comptable, ergothérapeute…) ;
  • De transports (y compris les dépenses d’aménagement du véhicule) ;
  • De logement (aménagement et le cas échéant, le forfait hospitalier) ;
  • De télévision et téléphone engagés durant l’hospitalisation ;
  • Professionnels ponctuels et/ ou exceptionnels exposés par la victime exerçant une profession indépendante ou libérale notamment pour le recours à du personnel de remplacement ;
  • De tout autre nature, non pris en charge par un autre poste de préjudice (par exemple : frais de garde d’enfants, perte d’une couverture médicale, surprime d’assurance, motivée par la situation médicale de la victime, sous réserve de la preuve du lien causal avec l’accident).


Lorsque les frais d’expertise judiciaire ne sont pas inclus dans le calcul des dépens (notamment en matière pénale), ils seront inclus dans ce poste.

La liste des frais n’est pas limitative.

En conséquence, tous les frais exposés par la victime avant la consolidation, qui ont été rendus nécessaires par le fait générateur, doivent être indemnisés.

Leur montant sera prouvé par la production de factures, voire de devis conformément au principe de non-affectation qui n’impose pas, même pour le passé, de s’acquitter d’une dépense nécessaire pour en obtenir l’indemnisation.

Toutefois, en pratique, des factures sont souvent exigées.

S’agissant des frais de transport, il existe une spécificité d’évaluation lorsque les déplacements sont effectués avec une voiture personnelle.

Les frais sont alors calculés en se fondant sur un relevé kilométrique établi par la victime (éventuellement conforté par une attestation du personnel soignant pour démontrer le nombre de trajets) et le barème kilométrique publié par l’administration fiscale.

Ce barème prend notamment en compte la dépréciation du véhicule, l’achat de protection (tels les casques pour les deux-roues), les frais de réparation et d’entretien, les dépenses de pneumatiques ainsi que la consommation de carburant et les frais d’assurance.

En revanche, les fris de péage ou de stationnement ne sont pas inclus.

Il conviendra donc de les ajouter.

Si plusieurs véhicules sont utilisés, il est nécessaire d’établir une demande pour chacun d’eux puisque les indemnités allouées dépendant de la puissance cylindrée du véhicule.

S’agissant des frais de téléphone, il doit être démontré que les frais exposés (coût intégral ou surcoût par rapport à la consommation habituelle) ont été induits par le fait générateur.

Lorsque ces frais sont réglés à un prestataire de services particulier (par exemple, en cas d’hospitalisation), ils sont rarement contestés.

En revanche, lorsqu’il s’agit de l’utilisation du téléphone personnel de la victime, il est impératif de démontrer que les frais supplémentaires sont bien imputables au fait générateur.

Le forfait hospitalier est constitué des frais d’hébergement et d’entretien supportés à l’occasion d’un séjour dans un établissement de santé.

Dès lors qu’ils ne constituent pas stricto sensu des dépenses de santé, il est plus juste juridiquement d’en solliciter le remboursement au titre des frais divers.

La jurisprudence a pu considérer dans un premier temps que ces frais devaient rester à la charge du blessé puisqu’ils constituaient des frais d’entretien courant qu’il aurait eu à exposer, même en l’absence d’hospitalisation.

Désormais, la Cour de cassation juge que ces frais doivent être indemnisés.

Ils constituent en effet une sujétion supplémentaire pour la victime qui continue de supporter par ailleurs ses frais fixes habituels (loyers, frais d’électricité, abonnement téléphonique, etc.).

Si les frais de médecins-conseils sont expressément visés par la nomenclature au sein de ce poste, les frais d’avocat n’y entrent pas et continuent d’être forfaitisés par les juridicions en application des articles 700 du Code de procédure civile ou 475-1 du Code de procédure pénale ou L.761-1 du Code de justice administrative.

Par application du principe de l’indemnisation en valeur, il devrait être possible aux conseils des demandeurs de solliciter la réactualisation de ces frais.

La pratique habituelle omet souvent cette actualisation. » (*)

En toute hypothèse, il convient d’être assisté d’un avocat habitué à ce type de dossier pour obtenir une juste indemnisation de l’ensemble des postes de préjudice.




* Max LE ROY, Jacques-Denis LE ROY, Frédéric BIBAL, L’évaluation du préjudice corporel, 21e édition LexisNexis